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Album

24 juillet 2016 - S.A.D.E

Fange

Purge

LabelThroatruiner Records
styleSludge
formatAlbum
paysFrance
sortieseptembre 2016
La note de
S.A.D.E
7.5/10


S.A.D.E

Chroniqueur doom, black, postcore, stoner, death, indus, expérimental et avant-garde. Podcast : Apocalypse

De la tripaille rougeâtre, sanguinolente, bien visqueuse et qui colle aux doigts. Bienvenue chez Fange, combo sludge en provenance de Rennes, projet lancé en 2013 par Benjamin Moreau de chez Huata. Après un premier EP, Poisse, remarqué, le groupe revient cette année avec son premier album, Purge. Le line-up a un peu bougé entre temps, on retrouve maintenant Matthias Jungbluth (également hurleur chez Calvaiire et patron de Throatruiner où sort l'album) et Boris Louvet aux fûts.

De la tripaille visqueuse sur la pochette donc, mais aussi dans la musique. Dès le premier titre, Cour Martiale, ça pue la viscère dans les riffs et ça dégueule de l'organe chaud dans le chant. Le son est toujours aussi étouffant que sur Poisse, peut-être même encore plus. Il y a toujours ces dissonnaces crasseuses qui font le sel de Fange, ces instants grinçants et glaçants remplissant encore davantage la musique de colère hargneuse. Et quand le tempo s'accélère (l'entrée en matière de Mâchefer, Girone Della Merda), la propension déboîte-cervicale de Purge s'exprime de la plus belle manière.

Le travail sur la production est assez impressionant, d'une densité qu'on pourrait rapprocher du swedeath, le tout obtenu avec seulement une guitare, pas de basse, juste une gratte qui balance de la crasse épaisse et gluante. Les structures des morceaux sont variées et assez peu redondantes. On alterne entre des passages lourds, poisseux et écrasants avec des accélérations de tempo qui lorgnent vers le hardcore d-beat, coup de boule et ramasse tes dents. Les titres sont relativement longs, prenant le temps de poser une identité, et par là Fange se rapproche un peu des Parisiens de Valve, dans la veine sludge/hardcore qui fait saigner les oreilles. Comme dit un peu plus haut, Matthias Junglbuth apporte une vraie plus-value au niveau du chant. Sa voix est moins mise en avant que chez Calvaiire, mais reste dense, bilieuse et tourmentée. Tantôt dans un registre grave et profond (la fiche promo mentionne Tom G. Warrior et il y a un peu de ça), tantôt plus écorché et désespéré, le chant s'accorde à merveille à l'ambiance apocalyptique de l'album.

Purge n'a pas vraiment de point faible, sa cohérence et son unité sont maîtrisées, néanmoins certains titres sortent un peu du lot. En premier lieu, Roy-Vermine, avec son final en chaos brut, ça larsen dans tous les sens pendant que la batterie se déconstruit lentement, et les hurlements de désespoir qui emballent le tout accomplissent le délicieux travail de saturation dissonante. Le dernier titre, Girone Della Merda, faisant écho au premier cycle des 120 Journées de Sodome de Pasolini, est quant à lui le dernier parpaing qui finit de t'emmurer : presque cinq minutes de sludge noisy sans concession, récupère ce qu'il reste de ton visage et ne demande pas ton reste.

Fange n'a pas fait dans la demi-mesure avec ce premier long format : six titres, six mandales. D'ailleurs la durée relativement courte de l'album est salvatrice, quelques titres de plus auraient été de trop, Purge s'arrête juste avant la saturation. Un premier album solide donc, qui confirme ce que Poisse laissait entrevoir : un groupe qui sait où il va, ce qu'il veut et ce qu'il fait. De la crasse rugueuse et hostile sur quarante minutes, vous voilà prévenus.

Tracklist de Purge :
01.Cour Martiale
02.Mâchefer
03.Roy-Vermine
04.Etouffoir
05.De Guerre Lasse
06.Girone Della Merda

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