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mercredi 23 décembre 2015

Hangman's Chair + The Witch + Computers Kill People + L'Aube Du Blâme

Péniche Spits - Douai

AxHell

Cramé de musique depuis 15 ans / cinéphile / retrogamer / vieux con / hater notoire. Ah, et je bosse chez les fous. Je le deviens peut être, à force.

Avant de signer mes premiers contrats, on m’a toujours expliqué que travailler, c’était le bien. Que c’était l’occasion de faire son trou, de démarrer une vie, une carrière. Se frayer un chemin à travers les méandres de la société, et d’y trouver sa place. A cela ajouté cette obtention d’un revenu fixe sensé assurer la stabilité du train de vie. On m’a aussi vanté les mérites de l’aspect purement humain de la chose : travailler, c’est aussi faire des rencontres. Voir du monde. Echanger avec des personnes soucieuses de notre avis, discuter avec des collègues intéressants et intéressés, réfléchir et agir, le tout ensemble. Travailler vers un objectif commun. Evidemment, m’expliquer d’entrée de jeu que les collègues sont potentiellement des êtres mauvais, perfides, ne perdant jamais une occasion de se foutre en arrêt pour des motifs wtf, ça m’aurait un peu refroidi hein. Voilà comment on peut se retrouver à assurer 5 postes du matin d’affilée avec un concert/after tous les soirs. Plaisant sur le papier, beaucoup moins lors des réveils !

C’est donc le lendemain de la tuerie Nightbringer et avec sûrement encore quelques relents éthyliques que je prends la route avec mon collègue ce samedi pour aller voir nos plus chauvins Doomsters, j’ai nommé Hangman’s Chair. En pleine promotion de leur dernier bébé en date, « This Is Not Supposed To Be Positive ». Le groupe, jouant ce soir à la Péniche Spits de Douai (ex-Igel Rock), est accompagné par les Parisiens de Computers Kill People et de deux groupes locaux, The Witch et L’Aube Du Blâme. A noter que l’asso Spits travaille cette fois de concert (huhu) avec Pachydermic Chords pour nous proposer cette date.

L’aube du Blâme :

N’ayant pas été des plus ponctuels cette fois ci, c’est presque tout juste que j’arrive pour assister au show de L’Aube Du Blâme. Enfin, j’ai quand même le temps d’aller saluer le patron et de m’enfiler une bonne bière pour attaquer la soirée dans les meilleures dispositions possibles ! Bref, le combo Valenciennois ne m’est pas inconnu. En effet, sans forcément les suivre, j’ai déjà pu repérer leur logo sur une poignée de flyers ici et là. Ma découverte en live, n’en déplaise à certains de mes collègues qui maugréeront dans leurs barbes, fut des plus intéressantes et m’amène à un constat clair et net : ce groupe est clairement au-dessus de 75% des groupes de Hardcore/Metalcore « débutants » - j’entends ici les groupes locaux et/ou fraîchement formés - que j’ai eu l’occasion de croiser sur scène, ni plus ni moins.

Armés d’une niaque à toute épreuve, les mecs nous balancent leur HxC à la tronche. Même si les codes du styles sont bien respectés, quelques originalités sont présentes, comme ce chant en Français et un certain « esthétisme » lyrical leur conférant presque une dimension sophistiquée. Dans les faits, L’Aube Du Blâme officie dans un Hardcore teinté de Metal me faisant penser aux premiers Killswitch Engage/The Arrs/L’Esprit Du Clan. Le set est varié, sachant se faire bien lourd et headbanguant tout comme beaucoup plus aérien et mélodique. Mention spéciale à ce passage carrément rappé. C’est évidemment un constat personnel, mais j’ai toujours tellement trouvé ça ridicule que des mecs déguisés comme des Weshs aient l’intime conviction de retourner des salles entières de concert avec leur musique brOOtale alors qu’elle est généralement infecte, mais aussi inculte. Quel groupe de Hardcore ici assume encore ses influences Rap Français et n’as pas peur de les poser (ainsi que ses couilles) sur la table ? Il n’y aura eu récemment que Djamhellvice (avec le chanteur de Providence) et Danforth pour me faire mentir !

Je retiendrai également l’encourageante capacité des mecs à se bouger pour ensuite faire bouger une salle. Sans raison aucune, le bassiste vient taper un saut en longueur et passe au-dessus des barrières de sécurité pour venir jouer peinard devant nous. M’est avis que dans une plus grosse salle et un public (bien) plus réceptif, ils puissent foutre le feu mais violent. Une bien bonne surprise que voilà au final. Je suivrai ça du coin de l’œil tant la capacité du groupe à prendre de l’ampleur très bientôt m’est évidente. Bien joué les gars !

Setlist : Remord / Notre déchéance / Au creux du Péché / Appel à la paix / N'oublie jamais / Malgré les coups / La mesure de l'Homme.

Computers Kill People :

Je sais que je radote, mais cette soirée démarre sous les meilleures auspices. Personnellement, qu’importe le style, j’adore être surpris. Ce sentiment de petitesse infinie qui vient semer le malaise quand tu t’apprêtes à déglinguer un groupe du haut de ton infinie culture de hater et….qu’en fait, bah,  c’est pas si mal que ça, voire assez bien. Il n’y a décidément que des groupes de merde et non des styles inintéressants.

Sur ce constat, il est temps d’aller se réhydrater pour accueillir les Parisiens de Computers Kill People. Fondé depuis 2010, le groupe compte deux réalisations au compteur : un EP (autoproduit) intitulé « The Fun Machine » datant de 2012 ainsi qu’un album complet sorti ce mois de décembre répondant au nom de « Silence Means Security ». Si je tarde à vous parler du style qu’il pratique, c’est pour souligner à quel point les étiquettes sont subjectives. Je m’explique : sobrement catalogués de « Stoner » via le flyer de l’asso, j’imaginais soit un truc enfumé à la Electric Wizard ou bien un Stoner plus énergique à la…Red Fang ? Rien de tout ça, en vérité, et j’ai encore un peu de mal pour mettre des mots dessus. Imaginez du gros Power Rock à la Danko Jones, une fièvre typiquement QOTSA, un groove qui fait directement penser à du Volbeat (merci à ma gonzesse pour m’avoir un peu converti à force de foutre le cd dans l’autoradio d’ailleurs !) et, je ne sais pas moi, un soupçon de Rock’n’roll bien old school, style du Rockabilly ? Pour ma part, je suis tout à fait conquis par la musique proposée par Computers Kill People, qui nous propose sauterie sur sauterie. Le public se laisse charmer assez vite, et de là où je suis posté, j’aperçois même des gens qui twistent. Carrément. De part sa capacité à mettre de l’eau dans son vin (comme les formations que j’ai utilisé pour décrire CKP, le chant se fait clair), j’imagine que les mecs peuvent se frayer un chemin à travers bon nombre de concerts/festivals aux programmations plus éclectiques et de ce fait, toucher plus de public encore. C’est tout ce que je peux leur souhaiter !

Très bonne découverte que celle de Computers Kill People. Le groupe a le chic de surfer sur plusieurs styles à la fois tout en proposant quelque chose d’assez personnel et de délicieusement groovy et énergique. A revoir avec plaisir si l’occasion m’est donnée !

Setlist : From Dust To Nothing / Omega Male / Freak / Dirt & Bad Whiskey / Blind / End Of Beauty / Love Me Two Times / Cupid’s Drunk

The Witch :

La soirée se déroule donc sans accroc et avec son lot de surprises bien senties. A ce stade du concert, le nombre de têtes présentes ici à la Péniche Spits doit dépasser les 150. Comme quoi, avec une bonne orga aux manettes, une affiche de qualité et un minimum de com’, tout est possible.

Une bibine de plus au compteur, et c’est déjà l’heure de The Witch, troisième groupe à ce soir. Ce nom ne m’est pas inconnu pour deux raisons. D’une part, le groupe est bien connu par chez nous car provenant de Douai, et donc souvent présent sur les flyers locaux. De plus, je me permets d’attirer votre attention sur Pachydermic Chords, la deuxième asso bossant sur cette date, drivée par Matthieu de The Witch justement. L’un dans l’autre, tout le monde s’y retrouve ! J’avais déjà eu l’occasion de voir le groupe sur les planches au Garage Café il y a quelques années de ça. Même si je peine à me souvenir de quoi il était question, je me rappelle juste avoir passé un bon moment. Avec le temps, le combo a sorti deux EP et a su imposer son style qui, décidément, est encore une fois assez nébuleux à décrire ! En effet, The Witch officie dans un hybride de plusieurs styles qui viennent s’entremêler pour un rendu assez atypique : imaginez des morceaux pêchus, entraînants et directs typés Rock des familles, avec tout ce groove qui caractérise la chose. Maintenant, ajoutez-y du growl et quelques parties de blast beat directement inspirés du Metal extrême et, pour finir, liez le tout avec une ossature à la limite du Prog’, où les patterns de batterie et les riffs ultra techniques viennent s’incruster là où ne les attends pas. Voilà qui peut étonner lorsque l’on est pas suffisamment préparé. Loin de moi l’idée de chipoter comme un gros connard, j’ai pour ma part apprécié le show sans soucis, mais si j’avais eu 3 ou 4 bières de plus dans le bide à ce moment la de la soirée, je n’aurais peut-être pas su m’adapter à The Witch et manifester toute l’attention nécessaire pour véritablement « rentrer dedans ». Ah, et j’aurai pas su revenir en bagnole chez moi, c’est certain.

Au final, The Witch confirme ce que je pensais d’eux : une mixture audacieuse de plusieurs styles qui fait mouche, si on sait se laisser charmer. Au plaisir de les repister dans les semaines / mois à venir !

Setlist : .Skeleton Soul / The Burning Tree / Suicide Bomber / Lost At Sea / The Wizard Is Stoned / Fear & Loathing / Pachyderm Storm / Iron Head / Ghost Brain Divinity / Hellride / From Here To Underground

Hangman’s Chair : 

Cette soirée, déjà des plus réussies, s’offre le luxe d’une tête d’affiche bien sentie dont je vous parlais quelques dizaines de lignes plus haut : j’ai nommé Hangman’s Chair. Une fois n’est pas coutume (et à l’heure du bilan 2015 chez Horns Up, je me rends compte que ça n’est arrivé que trop fréquemment), je ne découvre véritablement le groupe qu’avec ce live. J’avais évidemment survolé le premier skeud sorti à l’époque chez Bones Brigade, comme n’importe quel quidam curieux, et l’avais trouvé bon. Même constat pour le split avec Eibon sorti la même année (2007). Le temps faisant son œuvre, et presque 10 ans plus tard, après deux nouveaux splits et trois nouveaux albums dans les pattes, le groupe continue de distiller sa musique avec passion et humilité. C’est donc en parfait profane qu’adossé au bar, j’attends que le groupe foule les planches et confirme sons statut de tête d’affiche ce soir, en venant défendre « This Is Not Supposed To Be Positive », leur dernier effort fraîchement sorti.

Sur scène, le décor est déjà de mise : éclairages dans les tons roses / violets, rétro projecteur installé, pochoirs représentants des guillotines bien visibles, un sample utilisé en fond sonore nous immergeant à merveille dans une ambiance estaminet / troquet. En parlant d’univers, petite parenthèse : celui du groupe est juste su-bli-me. Passer à côté du stand de merchandising quand on à pas ou peu de ronds est juste la pire des tortures. Je vous invite également à aller checker leur page Metallum pour vous plonger dans leurs artworks, tous plus sordides et efficace les uns que les autres et rappelant quelque peu les travaux de Peste Noire. Après quelques minutes d’attente, le groupe investit la scène. Quelque chose comme deux morceaux plus tard, je suis conquis. Je suis pas hyper mauvais public de base, mais merde, quand c’est bien fait, faut le dire. Le groupe semble transcender cette image de Sludge haineux que j’avais conservé d’eux durant toutes ces années. Si, en effet, les compositions jouées conservent ce petit côté hargneux, revanchard et sale à la Crowbar, elles savent aussi se faire plus pachydermiques encore, à l’extrême limite d’un Stoner Doom par exemple, survolées par ce chant si mélodieux qui me fait penser, avec un coup dans le nez, à du vieux Candlemass. Des envolées plus typées Rock viendront également parsemer le set, faisant de Hangman’s Chair un groupe multi-facettes. C’est définitivement la soirée. Le son, quasi irréprochable depuis le début de la soirée, ne faiblit pas en termes de qualité. Sur scène, les mecs sont à bloc et, visiblement très heureux d’être présents, n’hésitent pas à se faire plaisir sur scène, le chanteur y allant au goulot avec sa bouteille de Jack, et le bassiste trouvant le temps d’en griller une durant les passages les plus lourds, même si c’est pour l’écraser à la mesure d’après. Les titres filent et le set d’une bonne heure passe comme cinq malheureuses petites minutes. Bouchons vissés aux oreilles, je suis dans ma bulle comme dans une sorte de transe et en ressort tout groggy.

Avec ce set aussi hypnotique que maîtrisé, Hangman’s Chair s’impose comme meilleur groupe de la soirée et comme une valeur définitivement sûre de la scène Française, Doom ou pas. Très certainement mon dernier groupe « à suivre » de cette année 2015, déjà très riche en bonnes découvertes.

Setlist : Dripping Low / Cut Up Kids / The Saddest Call / Requiem / No One Says Goodbye Like Me /  Flashback / No Rest I've Found / Ain't Living Long Like That / Open Veins (rappel).

Encore une excellente date chez Spits Asso, vivement la prochaine !

Remerciements à Spits Asso pour l’accréditation et à son taff, à Pachydermic Chords pour les mêmes raisons, aux groupes ayant joué ce soir, au public s’étant déplacé presque massivement (ça fait super plaisir) et à Horns Up, qui rend tout cela possible.