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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

Sargeist

Feeding the crawling shadows

LabelWorld Terror Committee
styleBlack Metal
formatAlbum
paysFinlande
sortiemars 2014
La note de
U-Zine
8/10


U-Zine

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Sargeist est une entité créée il y a une quinzaine d’années à l’initiative de Shatraug, leader historique d’Horna. Ce devait être à l’origine un projet solo, mais assez rapidement il fut rejoint par d’autres membres, notamment ceux de Behexen, si bien que nombreuses sont les similitudes entre ces deux formations. A ce jour, la discographie des finlandais est plutôt fournie, plusieurs splits, EP, démos, compilations mais finalement ‘que’ quatre albums studio. D’un Satanic Black Devotion blasphématoire jusqu’à un Let the Devil in à l’épopée sanguinaire, les scandinaves réalisent un parcours quasi-parfait. Feeding the crawling shadows est ainsi leur dernier méfait en date, tout juste sorti en mars 2014 chez World Terror Committee.

Autant le dire tout de suite, Sargeist n’a jamais fait le moindre écart dans sa ligne musicale depuis ses débuts, glorifiant la flamme originelle du Black Metal attisée depuis le début des années quatre-vingt dix. A chaque sortie, on sait plus ou moins à quoi on aura affaire, une leçon d’intégrité.

Trois quarts d’heure et une dizaine de titres, voilà ce que nous propose la horde nordique. La première chose qui m’avait choquée à la découverte de l’opus, c’était la production. Pourquoi, ô pourquoi avoir saccagé l’album par un mixage rendant les morceaux aussi brouillons et chaotiques ? Sans doute étais-je habitué à avoir un son s’améliorant leur discographie avançant, moi qui ai pourtant une oreille habituée aux productions infâmes comme les Black Legions ou les démos de groupes archi-underground d’Europe de l’Est. Ce n’est pas la qualité de l’enregistrement qui m’avait rebutée mais plutôt cette impression de compositions jouées dans une sorte de cavité souterraine, la sensation de confinement tout en ayant beaucoup de réverbération, rendant peu lisibles les titres. Difficile d’accès, voilà sans doute le terme exact pour qualifier ce Feeding the crawling shadows. Cette approche initiale m’avait failli conclure à un résultat en demi-teinte, pour ne pas dire une certaine déception.

Après des dizaines d’écoutes, mon jugement est totalement contraire, preuve en est de cette difficulté à appréhender la bête. Pour ainsi dire, j’éprouve depuis quelque temps une totale addiction à ce disque, Sargeist nous distille ici un déversement de haine dans tout ce qu’elle a de plus pure et noble. Pas d’allusion mielleuse, d’expérimentation hasardeuse ou de pleurnichements dignes d’un groupe de Post-BM , DSBM ou shoegaze, oh que non, les pensionnaires de Tampere nous offrent une galette aux compositions primaires et pas révolutionnaires pour un sou. Les riffs sont froids, misanthropiques, sardoniques, incisifs quand il le faut. Le jeu vocal de Hoath Torog est quant à lui parfaitement maîtrisé et varié, d’hurlements profondément venimeux aux intonations plus graves et incantatoires, celles qui vont font lever le poing au ciel, les pensées négatives plein la tête. Parmi les dix odes que contient l’opus, certains sont complètement jubilatoires, que ce soit le titre éponyme, une dévotion corps et âme au Grand Cornu, « The Shunned Angel », un rituel malsain, ou encore « Inside the Demon’s maze », métaphore musicale de la descente aux Enfers. Ce qui différencie Sargeist des autres groupes officiant dans le même registre, c’est le feeling, cette chose abstraite et indéfinissable. Et croyez-moi, la bande à Shatraug n’en est pas dépourvu, loin de là, tant cet hymne au supplice procure un sentiment addictif.

Niveau artwork, c’est à l’image du minimalisme musical, un membre à la tenue monacale, orné d’un pentacle et d’une croix renversée, fixant l’auditoire d’un regard blanc, vide et sournois. L’intérieur du livret, si on peut nommer cela ainsi, présente le contenu des incantations, sans le moindre artifice. Au final, les non-initiés auront très probablement du mal à rentrer dans cet opus, pas facile d’accès. Les invétérés du groupe (ou de Behexen) seront sans doute surpris par la production volontairement inférieure aux précédents opus. Néanmoins, une fois dedans, difficile de sortir des griffes des finlandais. Un très bon album.

 
 


1. Feeding the Crawling Shadows
2. In Charnel Dreams
3. Unto the Undead Temple
4. Snares of Impurity
5. Return of the Rats
6. The Unspoken Ones
7. The Shunned Angel
8. Inside the Demon's Maze
9. Kingdom Below
10. Funerary Descent