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Album

03 mars 2015 - Di Sab

Place of Skulls

With Vision

LabelSouthern Lord Records
styleDoom metal chrétien
formatAlbum
paysUSA
sortieseptembre 2003
La note de
Di Sab
9/10


Di Sab

Etant donné qu‘il va falloir attendre avril pour les nouveaux Acid King et Dopethrone, aujourd’hui nous allons revenir plus de 10 ans en arrière : l’époque où sortir un album de doom n’était pas « in », l’époque où les hipsters barbus fans de doom « depuis toujours » (ici il faut comprendre « avant toi ») répandaient le pus de leurs boutons d’acné sur leurs sweat à capuche Limp Bizkit, pendant que Wino (Saint Vitus, The Obsessed, Spirit Caravan et un paquet d’autres trucs) intégrait le Place of Skulls de Victor Griffin (Pentagram, In Graved) le temps d’un album : With Vision.

Qu’on se le dise, Wino est une sorte de pierre philosophale qui transforme, par son contact, tout en or. Un peu l’inverse de Bob Macabre que vous a présenté mon collègue DarkMorue il y a peu. Après avoir écrit les plus belles pages de Saint Vitus (et ainsi donner au groupe le statut qu’il a aujourd’hui) et après avoir sorti trois bijoux avec The Obsessed, Wino décide donc de s’allier avec Victor Griffin qui traversait alors sa période « j’ai trouvé la foi, transmettons le message du Seigneur via Place of Skulls » (et qui devait en avoir accessoirement marre des conneries de Bobby Liebling). Et vu le line up, ça ne pouvait être que bien, et à mon sens, le résultat final est encore meilleur que ce à quoi on s’attendait, ce qui est, vous en conviendrez, un prodige.

A la manière des fans de foot, le metalleux aime fantasmer sur des line up, conjecturer sur le résultat d’une association de musiciens n’ayant jamais bossé ensemble. Avant d’écouter With Vision, il est donc légitime de se demander si l’on aura affaire à du Pentagram où Bobby Liebling serait remplacé par Wino.

Ce qui nous fait arriver au principal défaut de With Vision : la prise de risque est proche de zéro. On a ici affaire à du doom ultra académique, à des années lumières du renouvellement qu’essaie d’entrainer la vague de groupes comme YOB ou Pallbearer. Quelques larsens, une voix reconnaissable entre mille et des riffs à la pelle.

Mais qui pourrait s’en plaindre ? D’une part, parce que il n’y a pas à attendre autre chose et, d’autre part, parce que tout conventionnel qu’est ce disque, il est réalisé par les plus grands artisans du genre. Il suffit d’écouter With Vision et son riff d’entrée, au groove si pur, pour s’en convaincre. En ce qui concerne l’instrumental, les soli occupent une place de choix dans l’album, ces derniers étant pris en charge par Wino et Griffin. Les deux guitaristes se répondent dans des styles bien différents qui rappellent The Obsessed d’un côté et, bien évidemment, Pentagram de l‘autre (Griffin ayant joué sur tous les albums majeurs du groupe) avant de finir en symbiose. Au niveau des paroles, la dimension chrétienne propre à Place of Skulls reste présente, bien que moins explicite et clichée que sur les autres albums où Wino ne fout pas son pessimisme à la Saint Vitus dans la foi de Griffin : pas de Blood of Jesus ou de Changed Heart ici, mais des paroles plus sombres, en témoignent les titres Long Lost Graves ou Lost qui conclut l’album de manière lugubre. On retrouve également des thèmes très américains, propre à la country : « Twenty years in Missouri, when I left the trees were green »… en 2003, sérieusement les mecs? On est où là bordel ? On vous a demandé de composer la B.O de O’Brothers? Il ne me semble pas, alors arrêtez vos carabistouilles de ricains, vous n’êtes pas Hank Williams putain!

Bon, je suis un peu tatillon, surtout que si on écoutait du doom pour la profondeur des paroles, ça se saurait, mais il fallait bien trouver quelques défauts à cet album oui ou non ? Non, parce qu’à part ça... y’a vraiment, mais vraiment rien à dire. Les deux pattes se retrouvent, se marient très bien, des chansons tendent vers Pentagram (la plus marquante d’entre elles est l’éponyme et cela s’entend avant même de savoir que Wino n’a pas coécrite celle ci), d’autres sonnent très The Obsessed (The Watchers), le tout entrecoupé par quelques instrumentales de 2 minutes (la très atmosphérique In Rest, peut être la seule touche « déroutante » du disque)… Une performance vocale dantesque, il ne pouvait en être autrement, une succession de riffs qui font figure de modèle du genre, la prod est assez lisse, mais ce n’est, à mon sens pas dérangeant. A noter que la pochette du vinyle n’est pas la sombre merde aux couleurs criardes (ce rouge « pute slave » nom de Dieu !) qui illustre cette chronique mais L’apparition de Gustave Moreau, illustration parfaite du titre de l’album. Un must-have pour tout amateur de doom à l’ancienne, bien trop méconnu au vu de sa qualité, précipitez-vous, vous ne serez ni déçu, ni surpris.

Tracklist :
1 Last Hit
2 With Vision
3 Long Lost Graves
4 Nothing Changes
5 Dimensional Sojourn
6 In Rest
7 Silver Cord Breaks
8 Willfully Blind
9 Dissonant Dissident
10 The Monster
11 The Watchers
12 Lost