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mercredi 5 décembre 2012

Glorior Belli

J.

U-Zine

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Glorior Belli, malgré une relative discrétion fait beaucoup parler de lui. Rencontre avec le leader d'un des rares groupes réussissant à allier la froideur du black metal et la chaleur d'un stoner metal ...

Bonjour, merci de nous accorder cette interview. Première question assez habituelle mais néanmoins nécessaire, Glorior Belli étant encore assez peu connu du public metal, peux-tu nous présenter le groupe ?

Glorior Belli est un groupe de Black-Metal français formé en 2002 par Infestvvs (Guitare / Basse / Chant), le seul membre originel restant et Antares (Batterie). Le groupe s'oriente alors vers un Black-Metal brut, rapide et violent rappelant les premières productions scandinaves avec une première démo, Evil Archaic Order, en 2003. En 2004, Glorior Belli entame la composition du premier opus du groupe, Ô Laudate Dominvs, à la fois brutal, mystique et occulte. Manifesting The Raging Beast leur second album sortira chez Southern Lord Records en 2007. En 2008 Antares revient brièvement derrière les fûts et Meet Us At The Southern Sign, leur troisième opus, sort en 2009 chez Candlelight Records où l'on découvre un Glorior Belli d'avantage intéressé par les influences Blues tout en gardant des ambiances sales et malsaines dans leur musique. Toujours dans une logique d'évolution, Glorior Belli pousse le concept encore plus loin avec The Great Southern Darkness qui paraît chez Metal Blade Records en 2011.

Vous évoluez dans un style à mi-chemin entre le black et le stoner. Comment définirais-tu ta musique ?

C'est une chose que je n'ai jamais vraiment apprécié, donner une définition à cette musique, simplement parce que mes influences sont relativement éparses et que chaque album composant la discographie de Glorior Belli propose une approche différente vis à vis de son prédécesseur (certains plus que d'autres bien entendu). Il est évident que Meet Us... sorti en 2009 fût Le tournant marquant pour Glorior Belli, étant les pionniers dans l'expérimentation du mélange du Black Metal et du Blues (Stoner, Desert Rock et autres dérivés) mais réellement je pense que ce serait trop réducteur de se limiter à cela. Certains utilisent le terme un peu passe partout d'Avant-garde, c'est peut être ce qui fonctionne le mieux pour être en adéquation avec la démarche du groupe. Cela fait maintenant 10 ans que nous existons et déjà à nos débuts les premières chroniques faisaient mention d’une certaine qualité “rock” dans les passages les plus mélodiques. A vrai dire c’est une facette du groupe qui était juste moins exploitée par le passé mais qui a toujours été présente, et l’évolution que nous avons connu n’est que le développement logique de ce que nous avons commencé en 2002. La particularité de Glorior Belli a toujours résidé dans les guitares, mon jeu n’étant pas vraiment adapté pour du Metal (dans le sens général du terme), étant issu d’une génération plus Folk/Rock/Sludge de part mes goûts personnels.

Glorior Belli a réussi l’exploit de mélanger la froideur du black metal avec la chaleur du stoner. Peut-on donc dire que Glorior Belli fait de la musique tiède, l'assemblage parfait ?

Je préfèrerai le terme "humide" à tiède, ce qui l'en ressort c'est une sensation de moiteur et de suffocation. Ce qui rend un groupe unique c'est son attitude, ses compositions, tout un ensemble de critères qui font qu'au final on peut aimer un groupe uniquement pour la violence qu'il dégage sur scène tout comme on peut l'apprécier pour pleins d'autres raisons. On peut aimer un groupe qui sonne comme tous les autres mais qui le fait bien également. Avec Glorior Belli nous proposons une alternative, une vision artistique différente et cela permet aux fans de ressentir des choses qu'ils n'ont pas forcément l'habitude de ressentir avec d'autres groupes. Le subtil mélange d'influences qui à priori ne sont pas franchement compatibles provoque un sentiment inhabituel chez l'auditeur et c'est cette nouveauté qui le saisit. Mais nous ne sommes pas les seuls à offrir cette opportunité, au contraire je trouve que la scène Black Metal évolue de plus en plus, en tout cas en France. Et les groupes toujours d'avantage se démarquent les uns des autres en exploitant des univers qui leurs sont propres. Lorsque les gens écoutent un album de Glorior Belli je veux qu'ils se sentent envelopper par notre univers justement et pour cela il faut faire en sorte de s'accaparer toute leur attention, piquer la curiosité et maintenir la tension. Pour moi c'est ça l'assemblage parfait. On peut dire que The Great Southern Darkness enfonce d'avantage le clou en insistant lourdement dans un style qui nous est propre et qu'aucun groupe n'avait proposé jusque là. Personnellement, j'ai trouvé mon équilibre avec Glorior Belli et ça se ressent forcément dans le son qu'on a développé ces dernières années. Le but étant de ne pas se reposer sur les acquis mais continuer à évoluer sans pour autant oublier de bien maîtriser auparavant tous les aspects qui définissent l'identité. C'est cet équilibre qui nous donne la force de continuer et l'envie de se mettre en danger.

Vous avez sorti l’an dernier The Great Southern Darkness. Comment s’est passé la genèse de cet album ? Y a-t-il un concept derrière ?

En réalité je ne pourrai pas vraiment expliquer avec des mots l’état d’esprit dans lequel je me trouve lorsque je suis en phase de composition, c’est d’avantage une question de ressenti pendant l’instant présent. La totalité de l’album a été composé d’un bloc, ce que j’ai essayé de mettre en place c’est une histoire, en suivant un fil conducteur partant du principe de création/destruction, le début de l’album est assez épique et regorge de passages plus violents, une sorte d’accouchement difficile faisant écho au combat entre les forces qui s’opposent au sein d’un univers instable. La suite se veut plus posée, inspirant le calme avant la bataille finale. Les notes qui résonnent sur le dernier titre sont particulièrement intense, de sorte à former un monolithe qui recueil l’essence même de Glorior Belli sous toutes ses formes. C’est de cette façon là que je perçois la conception de The Great Southern Darkness, un titre qui n’est pas anodin. Il a pour intérêt de résumer en quelque sorte l’ambiance générale de l’album à travers les notions qu’il dégage. Au delà de l’hommage à peine voilé, en opposition à la majorité de la population féminine en France aujourd'hui, à un groupe que je n’ai pas besoin de citer ici, c’est également en rapport avec le concept inspiré de l‘Enuma Elish. Un texte qui trouve ses origines au panthéon de la mythologie Suméro-Babylonienne. Plus précisément, c’est le culte de Tiamat dont il est question, de la création/destruction de l’univers et l’interprétation que nous en avons fait.

Quels échos as-tu eu de cet album par les fans et par la presse ?

Je n'ai eu que des bons retours ne prêtant pas attention aux mauvais. Plus sérieusement, dans l'ensemble c'est très positif, je ne m'étendrai pas trop sur la question c'est plutôt nos agents qui s'occupent de ça aujourd'hui. De manière générale c'est encourageant de voir les réactions mais on ne s'y laisse prendre qu'un court instant dans une longue carrière d'artiste.

Le line up a intégralement changé en 2011. Pourquoi ce choix ? Penses-tu que la composition actuelle du groupe soit la plus optimale qu'il soit ?

Le line up a intégralement changé chaque année, voir tous les semestres depuis que j'ai fondé le groupe en 2002 si l'on veut pousser l'ironie à son comble. La liste des membres s'allonge sur Metal Archives au fil des années et à chaque fois j'aurai pu répondre positivement à cette question, non pas que je sois crédule mais parce qu'il est essentiel de placer toute sa confiance et sa motivation dans la bonne direction. Sur le fond comme sur la forme, Glorior Belli aura toujours été un projet solo dans lequel je suis secondé par des musiciens de session pour les concerts ou besoins du studio, notamment pour la batterie que je ne maîtrisais pas toujours suffisamment bien pour m'en charger moi même. Au jour d'aujourd'hui je suis entouré de gens en qui j'ai entièrement confiance, ma définition "d'optimale" n'étant pas véritablement la même que par le passé.

Vous avez quitté Candelight au profit de Metal Blade. Peux-tu revenir sur les raisons de ce choix ? Est-ce un aboutissement de signer sur un label aussi reconnu ?

Candlelight c'est assez simple à expliquer, les gens ont une assez bonne opinion du label de part sa réputation dans le passé, mais la plupart des groupes faisant ou ayant fait parti de leur roster ne partagent pas cet avis. Je laisse en tirer les conclusions qui s'imposent. S'étendre sur le sujet n'est pas vraiment utile et j'ai tendance à perdre mon professionnalisme sur la question. Disons que c'est plutôt bénéfique pour le groupe en effet de pouvoir changer comme ça à chaque fois de label en allant au plus offrant, mais cette fois avec Metal Blade les choses se sont passées un peu différemment. Autant les deals que nous avions eu par le passé s'étaient spontanément offerts à moi, autant cette fois la négociation a pris du temps, pour des bonnes raisons. Et c'est uniquement grâce à cela que je suis en mesure d'affirmer aujourd'hui que je n'ai pas seulement trouvé un distributeur, mais un endroit que je suis fier d'appeler une "Maison" de disque. Les effets positifs se sont fait ressentir immédiatement suite à la signature, médiatiquement c'est certain, pas nécessairement en terme de tournée pour le moment (mais c'est un peu à part en général). En tout cas au niveau relationnel c'est parfaitement maîtrisé là aussi, tout en gardant un côté simple dans nos communications. C'est ce qui fait la force d'un label comme Metal Blade, qui est présent depuis très longtemps et qui a su évoluer et s'adapter. C'est assez incroyable d'être signé chez eux mais quand on connait la qualité du nouvel album de Glorior Belli ce n'est pas vraiment une surprise. Une énorme quantité de travail, une petite dose de chance que l'on va provoquer, c'est ça la clé du succès.

Il y a un an et demi, vous avez sorti un split avec Creeping. Peux-tu revenir sur cette collaboration ?

Creeping est un groupe Néo-Zélandais évoluant dans un registre Black Metal/Sludge dont fait parti un ami répondant au nom de Marko P. Je n'ai jamais été très friand des formats split pour diverses raisons mais on a proposé quelque chose de relativement poussé artistiquement parlant, le packaging, la composition, la cohérence, pas de ver pour gâcher la pomme. J'y vois d'avantage du bonus pour les fans qu'autre chose au final.

Peu de groupes français ont l’honneur de fouler les planches du Hellfest. Vois-tu ta présence à ce fest comme un aboutissement ou une étape de plus dans l’histoire du groupe ?

C'est un aboutissement ET une étape supplémentaire à la fois. Il nous aura fallu 10 ans d'existence, pour certains c'est plus rapide, pour d'autres cela ne se produira jamais. C'est une belle récompense et une motivation supplémentaire pour y retourner plus tard, dans d'autres conditions qui sait. En tout cas c'est l'objectif que je me fixe à présent. Concrètement le groupe est reconnu à l'international mais c'est toujours plus difficile de se faire apprécier dans son propre pays et c'est un challenge que nous comptons bien relever avec ce nouvel album. Il serait dommage que Glorior Belli compte parmi les plus importants représentants de la scène Black Metal Française partout ailleurs sauf en France. Nous avons besoin du soutien de nos compatriotes aujourd'hui plus que jamais.

Pour poursuivre sur le Hellfest, entre Glorior Belli, Lynyrd Skynyrd, Hank William III et bien d'autres … Peut-on dire que sur ce Hellfest, « The South will rise again », que l'esprit sudiste est encore bien vivant ?

On peut dire que les fans de cette scène ont été plutôt gâtés cette année c'est certain, moi même j'ai eu mon lot d'émotions à ce niveau là. L'esprit sudiste c'est la base de tout et les représentants sont toujours là pour le rappeler.

Peux-tu nous parler de ton projet solo « 11 as in Adversaries ». Pourquoi avais-tu besoin de séparer ces deux entités ?

Séparer les deux projets s'est avéré indispensable en fin de compte, afin de pouvoir exorciser une forme d'inspiration qui me tourmentait et qui n'avait pas vraiment sa place au sein de l'évolution de Glorior Belli même si en réalité l'album d'11 aurait pu être situé entre Meet Us et The Great Southern Darkness. Je le conçois comme une période de transition nécessaire, une sorte d'échappatoire pour déverser un trop plein de créativité. Le résultat n'en est pas moins admirable et aujourd'hui la bête s'est pourvue d'une volonté qui lui est propre.

Vous jouez beaucoup sur la discrétion (clip sans visage, pseudo des membres). Est-ce important pour toi de conserver cet anonymat ?

Parallèlement en fait on a abandonné l'utilisation de pseudonymes dont le seul but était de conserver cet anonymat, puis quelques temps après la capuche est tombée si je puis dire. Je n'ai plus vraiment de plaisir à porter ce masque à présent, ayant été copié maintes fois. De plus, cela s'avérait être un frein sur scène à mes vigoureuses tentatives de communication avec le public. De nombreuses fois dans l'impossibilité d'accrocher un regard, de montrer le feu qui s'anime dans mes yeux lorsque nous nous produisons, c'était une frustration réelle. Je souhaite tout de même maintenir un certain niveau de discrétion vis à vis ma vie privée.

Quel est le futur proche pour vous ? Continuer de tourner pour promouvoir l'album ?

C'est exactement cela. Nous travaillons également à la sortie d'un nouvel album dans un futur plus ou moins proche. Prochain gros évènement à venir, le Maryland Deathfest 2013.

Merci pour ton temps, je te laisse le mot de la fin ...

Yippee kai yay mother fuckerz!

Merci à J. pour son temps et sa disponibilité.