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Album

09 décembre 2014 - U-Zine

In Flames

Clayman

LabelNuclear Blast
styleDeath metal mélodique
formatAlbum
paysSuède
sortiejuillet 2000
La note de
U-Zine
8/10


U-Zine

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Dernier album de l'ère "pré-Reroute to remain" Clayman, comme tout album d'In Flames, marque une évolution par rapport aux albums précédents du combo sans pour autant donner l'impression d'écouter un groupe radicalement différent. Du moins jusqu'à Reroute to remain...

En toute logique, Clayman poursuit sur la lancée de Colony avec un line-up stabilisé : Peter Iwers à la basse, Daniel Svensson qui propulse de ci de là sans trop de difficultés des tapis de doubles pédales plus rapides que ceux des précédents albums et un Björn Gelotte définitivement installé au poste de guitariste. Armé de ce line-up stable, les possibilités musicales du groupe s'en retrouvent accrues et on sent le groupe sûr de lui. En découle 11 morceaux qui créent un album "bloc".

Cet album possède le son le plus abouti d'In Flames à cette époque. La basse ronronne, chaque instrument est à sa place, le son des guitares est tranchant et froid juste ce qu'il faut, Anders grogne avec une voix death de mieux en mieux maitrisée et se dispense de chant en voix claire. Seuls des murmures et quelques lignes plus "parlées" que vraiment chantées viennent ponctuer l'album sur divers titres mais cela passe plutôt bien et ajoute une touche de modernité. Les chansons n'excédent que rarement les 4 minutes au compteur (4 sur 11), sont toutes munies de couplets et refrains catchy bien identifiés servis sur des structures simples et armées de breaks lourds ou propres au headbanging (le break du titre éponyme ou celui de Swim). Seuls quelques titres comme Suburban me, Another day in quicksand et Brush the dust away entre autres développent des structures plus progressives, comme on en trouvait sur Colony, souvent dûes aux changements de feeling des solos : la rythmique se calme ou stoppe net sur les notes langoureuses de la lead avant de s'emballer dans un rapide break sur le finish. Les samples et synthés sont présents mais restent relativement en retrait et se contentent de quelques notes pour créer des nappes et renforcer une ambiance.

C'est d'ailleurs un des éléments à classer au rayon du son In Flames période "pré-Reroute to remain". Cet album est peut-être le dernier sur lequel les sons éléctroniques, discrètement, accompagnent ou appuient les ambiances ; à partir de Reroute To Remain ils auront tendance à être bien plus mis en avant dans le mix ou à être utilisés en tant que mélodies à part entière, tâche réservée jusque là aux guitares. D'ailleurs, le schéma mélodique d'In Flames pour les mélodies sera bouleversé après Clayman. Sur ce dernier, la guitare rythmique produit des power chords qui se coordonnent à la batterie tandis que la guitare lead s'envole dans des mélodies accrocheuses, parfois harmonisées, et toujours bien trouvées ! On se retrouve avec un son massif et une mélodie catchy. Pour ceux à qui cette représentation ne parlerait pas trop, écouter la mélodie d'intro du hit Black tears de Edge of Sanity et vous comprendrez de suite ce que pratique, à quelques détails près, In Flames pour ses mélodies jusqu'à Clayman.

Fait marquant de cette période "pré-R2R", les power ballades s'intègrent encore bien dans l'ensemble des albums. Ici, Square Nothing et Satellites and Astronauts ne ralentissent pas le rythme de l'album tout comme avaient réussi à le faire les Jester Script Transfigured ou autre Worlds within the margin sur Whoracle et ne ressemblent pas à des ballades commerciales. De même, lorsqu' In Flames décide de faire un couplet seulement entrecoupé de saccades de guitares pour laisser la rythmique basse/batterie et le chant s'exprimer (schéma très utilisé sur l'album Soundtrack to your escape) nous n'avons pas droit à des synthés de tous les côtés. Non ! Sur Clayman, on utilise une reverb sur la batterie tout simplement ou on pratique un chant murmuré pour appuyer l'ambiance. Les effets sur le chant sont eux aussi utilisés avec parcimonie et ne choquent pas l'oreille de l'auditeur.

Tous ces détails déjà utilisés plus ou moins timidement sur les albums précédents continuent de modifier le son global du groupe mais aussi sa manière d'écrire des hits en se concentrant sur l'essentiel. On sent que le groupe mûrit et préfère de plus en plus travailler les petits détails et autres arrangements plutôt que de partir dans des breaks interminables ou des morceaux plus longs, épiques et techniques. J'utilise donc le verbe "moderniser" pour Clayman car cet album possède quelque chose de moderne, quelque chose qu'on pourrait qualifier d'urbain, quelque chose qui rappelle le besoin urgent de posséder l'essentiel, l'utile, l'efficace. Colony sonne à mes oreilles de façon moins "moderne" que Clayman mais paradoxalement plus "futuriste" dans son ambiance globale. In Flames ne s'embête plus à passer par divers chemins, mais crée juste 11 titres simples (mais pas simplistes ! notez la nuance !)qui font mouche à coup sûr chez l'auditeur. Et c'est là une force que développera encore In Flames : l'art d'écrire de bonnes chansons qui vont à l'essentiel tout en réservant parfois quelques surprises !

Je dis "juste" mais c'est une vraie prouesse de réussir à écrire des titres qui soient tout simplement agréables à écouter du début à la fin. In Flames ne réinvente pas le death mélodique, In Flames n'essaie pas d'en mettre plein les yeux par la technique ou les structures complexes, In Flames ne crée pas d'hymnes intemporels et universels (quoique Only for the weak qui se démarque un peu du lot grâce, ou à cause, de son sample typé "victory rock"....) mais In Flames sait mettre le bon cri au bon moment (Clayman), faire monter la tension petit à petit au travers de ses couplets, pré-refrains, refrains (Pinball Map), provoquer le petit frisson au détour d'un riff ou d'une mélodie, etc...

Je noterai deux ombres au tableau cependant. Tout d'abord, les titres Suburban me et Pinball Map : l'un pour être un peu trop moyen, l'autre pour être un peu trop bon. Suburban me n'est pas mauvais en soin, il est même plutôt agréable, mais s'il se retrouve placé en avant-dernier sur la track-list ce n'est pas non plus par hasard. Son refrain n'est clairement pas le meilleur de l'album, sa mélodie-thème n'est pas renversante, le morceau est quelque peu monotone, sans réel relief. Il faut attendre le solo de Christoffer Amot d'Arch enemy venu en guest pour se réveiller quelque peu à coups de floyds et sweepings. Mais un seul morceau moyen entouré de 10 autres bons titres n'est pas tellement en soi un gros défaut pour un album.

Pinball Map quant à lui est presque trop "heavy" par rapport à tout le reste de l'album.C'est l'un des deux ou trois seuls morceaux de l'album joués avec un accordage encore plus bas que l'accordage traditionnel d'In Flames ; et ça s'entend ! La mélodie imparable vous entraîne sans prévenir, le couplet saccadé coule de source appuyé par un chant doublé très grave d'Anders (un gimmick qu'il ne refera presque plus après cet album d'ailleurs et c'est dommage), le pré-refrain harmonisé lancé par un chant déchirant arrive pour aboutir sur un refrain mélodique, lourd avec une voix puissante chargée d'écho, etc... ce morceau est juste mélodique, agressif, lourd, rapide, catchy et finement pensé et exécuté du long de ses 4 minutes bien remplies mais qui passent à la vitesse de la lumière. Ce titre est si condensé, si efficace du début à la fin et il s'écoule si naturellement qu'il paraît avoir été créé sans effort.

L'autre ombre au tableau est la perte petit à petit de cet aspect mélancolique voire épique que possédait In Flames à leur début. Sur The Jester Race et Whoracle notamment on ressentait une certaine tristesse qui s'amenuise doucement au fil des albums et au fil d'un son qui se modernise de plus en plus. Je n'irai pas jusqu'à dire que les mélodies d'In Flames deviennent de plus en plus "joyeuses" mais on sent que le feeling et les mélodies de l'album Clayman reposent sur de la maturité, de la sécurité, de la confiance, les mélodies sont bonnes mais moins déchirantes, moins fragiles que sur The Jester Race par exemple, moins chargées d'écho et de reverb, un peu plus "aseptisées". Est ce consciemment ou inconsciemment que le groupe se sépare de cette mélancolie ? Un détail pourrait nous orienter : Another day in quicksand, le titre le plus mélancolique de Clayman, clôture l'album. Faut il voir ce placement comme une relégation du titre le moins bon en fond d'album ou plutôt comme une place de choix pour un titre mélancolique qui clôture en beauté et tristesse un album chargé de morceaux tous aussi bons les uns que les autres ?

En 2000, In Flames continue sur sa lancée, amorce doucement un virage vers quelque chose de plus concis et moderne mais garde encore par moments cette mélancolie et ce côté épique des premiers albums. Reste un album agréable rempli de bons passages et bien écrit qui procurera à tout amateur de métal moderne mélodique (death ou pas) 43 minutes de plaisir !


1. Bullet Ride
2. Pinball Map
3. Only for the weak
4. ... As the future repeats today
5. Square Nothing
6. Clayman
7. Satellites and astronauts
8. Brush the dust away
9. Swim
10. Suburban me
11. Another day in quicksand

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