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Raton - Bilan 2018

jeudi 10 janvier 2019
Raton

Amateur de post-musique, de larsens et de gelée de groseilles.

Musicalement, cette année a été assez ambivalente pour moi.
D'une part j'ai écouté plus de musique que jamais - plus de 20 000 titres, soit environ 4000 de plus que les trois dernières années (merci Last.fm) - mais d'autre part, c'est l'année où j'ai écouté le moins d'albums depuis 2014 - 220 cette année contre quelques 570 en 2016 par exemple -. Je préfère ce rythme car il me permet de plus me concentrer sur mes découvertes et mes coups de coeur. Je m'éparpille moins et sortir de la boulimie musicale m'a permis de me plonger plus en profondeur dans l'ambiance de certains artistes. 
J'ai plutôt bien réussi à suivre les sorties qui me faisaient de l'oeil mais j'ai encore raté tout un paquet de triples A. Ça me fera des devoirs pour 2019 !
 

L'année 2018 a marqué ma plongée dans l'univers hardcore qui ne cesse de me régaler. Enfin plongée, il serait peut-être plus légitime de dire "l'écoute de quelques nouveaux artistes HxC et surtout le binge-listening de Turnstile" dans la mesure où les 4 morceaux que j'ai le plus écoutés cette année proviennent tous du dernier album des Américains. Je me suis aussi éloigné de mon genre de prédiction, le doom, un peu malgré moi à cause de plusieurs sorties médiocres.

Plus affamé que jamais, je commence l'année 2019 en contemplant l'océan de possibilités qui m'attend. J'ai hâte de me goinfrer de nouveaux genres, de surprises, de vieux classiques oubliés et de plaisirs coupables. Les scènes que j'aimerais le plus explorer sont vastes : screamo et midwest emo, rock in opposition et zeuhl, ambient techno, approfondir la passionnante scène actuelle de (t)rap de bourrin et encore mille autres choses.

Alors j'espère que mon bilan de cette année vous permettra de découvrir quelques pépites et qu'il vous donnera l'envie d'écouter toujours plus de choses comme regarder/lire des tops 2018 me fait noter des dizaines d'albums qui sont passés à côté de mes oreilles.

 

Top Albums Metal/Bourrin

1. Turnstile – Time & Space (Roadrunner Records)
J'étais vraiment parti pour mettre Yob en première position mais ce serait vraiment ingrat. L'album que j'ai poncé en long, en large et en travers c'est le dernier né de Turnstile. Rarement un album m'aura rendu autant dingo. Je n'aime pas vraiment écouter les singles avant la sortie de l'album, Turnstile m'a fait changer d'avis. Je n'aime pas non plus écouter un album en boucle, là encore Turnstile m'a retourné le cerveau. J'ai écouté Time & Space dans toutes les circonstances imaginables : pour me lever, pour me donner un coup de boost, pour m'aider à bosser à 2h du matin, pour prendre le métro. Il s'agit définitivement pour moi de l'album du sourire, de la joie, de la bienveillance (et de 2018).

2. Yob  Our Raw Heart (Relapse Records)
Véritable perle sludge-doom, Our Raw Heart prouve avec pudeur et génie que Yob est au-dessus de tous les autres groupes de sa scène. L'album est tellement bien que j'essaye d'écrire quelque chose dessus depuis six mois. Mention spéciale à "Beauty in Falling Leaves", chef d'oeuvre de puissance et d'élégance.

3. Harm's Way – Posthuman (Metal Blade)
Posthuman est arrivé dans mes oreilles pile au moment où j'en avais besoin. Un album ultra trapu, vilainement distordu dont la moindre pichenette fait décoller du sol. J'avais écrit à l'époque : "
les riffs sont du papier de verre, la batterie explose un tympan à chaque coup de grosse caisse et de caisse claire, les lignes de basse causent des descentes d'organes et les breaks occasionnels collent un sourire abruti jusqu'aux oreilles". Sept mois après, je ne regrette pas le moindre mot.

4. Obliteration – Cenotaph Obscure (Indie Recordings)
Obliteration a toujours occupé une place très spéciale dans mon petit coeur. Ce sont eux, plus qu'aucun autre groupe, qui, avec leur précédent effort, "Black Death Horizon", m'avait introduit au death metal sérieux. Alors pourtant qu'on peut vite être déçu par ses premiers amours, Obliteration me séduit à nouveau par ses douces sérénades et ses mots d'amour. Doté d'une durée parfaite (40 minutes) et d'une production délicieuse équilibrée, l'album se paie le luxe de dépasser le dernier Bloodbath en matière de death gras du bide.

5. Outre-Tombe – Nécrovortex (Temple of Mystery)
Je ne suis pas vraiment un énorme fan de death metal, mais c'est pourtant la scène dont j'ai le mieux suivi les grosses sorties cette année. Outre-Tombe m'est tombé dessus tout à fait par hasard, m'a évoqué les plus grands noms de la scène death US et m'a emmené avec lui six pieds sous terre. Dégoulinant comme jamais mais sans jamais oublier de groover, les Québécois sont ma surprise death de l'année !

6. Frontierer – Unloved (indépendant)
Si mes connaissances mathcore s'arrêtent à Converge et le premier Daughters, c'est Frontierer qui est venu cette année me mettre une patate de forain en plein dans les chicots. Un album complètement méchant, cruel et dissonant qui fait se questionner l'auditeur sur son rapport au masochisme.

7. Bongripper – Slow Death (Great Barrier)
Ecouté très tardivement, le dernier Bongripper rattrape pourtant aisément la cohorte des albums de musique lourde écoutés précédemment. C'est une leçon de sludge/doom adressée à tous les groupes qui ne font plus que recycler les codes éculés du genre sans y mettre de la passion et de l'intensité.

8. Slugdge – Esoteric Malacology (Willowtip)
J'adore ce qu'est Slugdge et ce que le groupe représente comme tendance dans le metal. De la musique qui ne se prend pas au sérieux mais sans être écrite avec les pieds et qui soulève des préoccupations sociales et politiques subtiles (en l'occurrence l'écologie). Cet album, en convoquant parfois GojiraMastodon ou Bolt Thrower ne sombre jamais dans la référence stérile et se révèle parfaitement équilibré et gratifiant.

9. Messa – Feast for Water (Aural Music)
Le premier album était déjà très goûtu mais le second envoie clairement Messa dans la stratosphère. Je me demande déjà pourquoi personne n'avait encore eu l'idée d'incorporer du dark jazz dans le metal extrême (là vous allez me citer Lantlôs ou 
Free Nelson Mandoomjazz mais ma mauvaise foi me permet de vous ignorer) car la musique de Messa sonne tellement naturelle et évidente. Entre la lourdeur et la grâce, entre la distorsion et l'élégance, Messa n'a pas réussi à choisir (et c'est tant mieux).

10. Green Druid – Ashen Blood (Earache)
Enfin Green Druid nous a aussi prouvé qu'en 2018 il était possible de faire du Sleep-worship de grande qualité et ça, ce n'est pas une petite réussite. Je n'arrive pas à résister à la tentation de la phrase-choc alors je me lance : je crois même que Green Druid a fait un meilleur album de Sleep que Sleep eux-mêmes cette année. Débrouillez-vous avec ça.

Mentions honorables :

Ghostemane – N / O / I / S / E (indépendant) : oui je sais Ghostemane ne fait que pomper Trent Reznor sur des grosses rythmiques trap de bourrin avec des screams des enfers mais que voulez-vous, ça me rend tout à fait fou.

Moonlight Drowns – Destiny and the Aftermath (indépendant) : black metal groenlandais réinstallé en Australie, Moonlight Drowns livre un black metal lo-fi, vaporeux et cosmique. Bien qu'assez bancal, le premier titre "2000 Years of Astral Travel" vaut clairement le détour.

Mais aussi : Bloodbath, Tomb MoldDeströyer 666Besvärjelsen, Windhand, Wiegedood, Fu Manchu, LLNN, Mahr

 

Top Albums Non Metal

1. Anna von Hausswolff – Dead Magic (City Slang) [Neoclassical Darkwave]

2. Moderator  Sinner's Syndrome (Melting Records) [Instrumental Hip-hop]

3. Krampusnacht – Superstar (indépendant) [Dungeon Synth]

4. Denzel Curry – TA13OO (Loma Vista) [Trap / Southern Hip-hop]

5. Pusha T Daytona (Good) [Hardcore Hip-hop / Southern Hip-hop]

6. Daughters – You Won't Get What You Want (Ipecac Recordings) [Noise Rock / Rock industriel]

7. Vox Low – Vox Low (Born Bad Records) [Coldwave / Post-punk]

8. Merlin – The Wizard (The Company) [Rock progressif / Rock psyché]

9. Death Grips – Year of the Snitch (Thirld Worlds) [Hip-hop expérimental]

10. Hilyard – Furthermore (Cryo Chamber) [Space Ambient]

 

Découvertes

Have Heart : la découverte de ce groupe a transformé mon année musicale. Je suis tombé complètement amoureux de leur Songs to Scream at the Sun, merveilleuse oeuvre de hardcore mélodique dont l'efficacité rivalise avec l'intelligence de composition. Cerise sur le gâteau, les paroles sont brillamment écrites, comme en témoigne le déchirant "Bostons" sur la thématique de l'abandon paternel.

Chico Buarque (musique populaire brésilienne) qui a illuminé bien des après-midi avec sa musique chaude et rassurante qui reste bien collée dans toutes les parties du cerveau si bien que l'écouter régulièrement devient une obligation cérébrale.

Le touchant He Has Left Us Alone, but Shafts of Light Sometimes Grace the Corner of Our Rooms… de A Silver Mt. Zion (Post-rock) qui m'a accompagné dans bien des nuits de travail.

La discographie intégrale de 16 Horsepower (Country gothique), inégale mais constellée de trésors ruraux et mystiques.

Ma réconciliation avec Emperor dont la rencontre décevante avec In the Nightside Eclipse m'avait dégoûté. Heureusement, ma première (!) écoute du formidable Anthems to the Welkin at Dusk (il n'est jamais trop tard) a remis les pendules à l'heure.

En hardcore, les découvertes étincelantes de IncendiaryRefusedGod Mother et Snapcase.

La découverte de Esoctrilihum (Black metal), Patto (vieux hard/prog), Cadaverous Condition (mélange incongru de death et de néofolk), La Luna (screamo), Oxiplegatz (metal prog) et bien d'autres délices.


Déceptions

Shining – Animal (Spinefarm) : comment passer à côté du naufrage de Shining ? Autrefois groupe de metal avant-gardiste et progressif auto-proclamé "blackjazz", les Norvégiens ont sombré dans le rock alternatif à la 30 Seconds to Mars sans que personne ne comprenne bien pourquoi car globalement c'est très mauvais (cf. l'excellente chronique de S.A.D.E)

Conan – Existential Void Guardian (Napalm Records) : le géant s'essouffle et peine à se renouveler. Pour un avis plus développé, je vous conseille ma chronique.

Le Mystère des voix bulgares feat. Lisa Gerrard – BooCheeMish (Prophecy) : tellement en-dessous de ce que ça aurait pu être. Clairement inférieur au travail et du collectif bulgare et de la chanteuse de Dead Can Dance.

Khemmis – Desolation (20 Buck Spin) : doom metal cheesy à souhait, la musique de Khemmis a réussi à me repousser alors que je suis un grand fan de doom. Ringard et pas inspiré pour un sou, j'ai peiné à trouvé la créativité dans l'ensemble et j'ai amèrement regretté l'absence de prise de risques.

Délice – Sillage (indépendant) : projet de blackgaze du fondateur de Skyforest extrêmement générique et peu inspiré malgré un concept prometteur.

Ghost – Prequelle (Loma Vista) : pas vraiment une déception car j'ai toujours trouvé Ghost assez naze mais cet album est une confirmation de la passion pop du groupe et de mon peu d'appêtance pour le sirupeux.

Solstice – White Horse Hill (White Horse / Iron Bonehead / Dark Descent) : alors que je suis dingue de leur premier album, Solstice revient 20 ans après leur dernier LP pour nous servir une soupe fade et oubliable. La voix de Paul Kearns étant trop éloignée de celle de Simon Matravers, l'album ne verse plus dans l'epic doom mais dans le doom générique.

Age of Taurus – The Colony Slain (Rise Above) : voir ci-dessus

Sleep – The Sciences : semi déception dans la mesure où l'album n'est pas mauvais mais les attentes étaient tellement hautes qu'il m'est difficile d'être pleinement satisfait (cf. ma critique)

Déceptions pêle-mêle : The Ocean (bon mais loin derrière le précédent), Zeal and Ardor (pareil), Ivar Bjornson & Einar Selvik (pareil), Trappist (du gros hardcore qui parle de bière et c'est aussi plat ??), ToundraMonster MagnetAcârashChevalier et en hors-metal : GorillazBen HowardJack White (what have you done Jack ?), Arctic Monkeys et Atrium Carceri.


Top concerts

1. Yob @ Petit Bain (Paris)
2. Turnstile @ Gibus (Paris)
3. Nesseria @ Bus Palladium (Post in Paris)
4. Carpenter Brut @ Olympia (Paris)
5. Der Weg einer Freiheit @ Trabendo (Paris)

Mentions honorables : MontagneIncendiaryMoonsorrowLost in KievWiegedoodFury.


Playlist récapitulative